Aug 21, 2021 10:19 UTC
  • US/Israël dans le piège du Hezbollah!

Tous les Libanais, même les opposants au Hezbollah, pensent que l’importation du carburant d'Iran par la Résistance est une action intelligente, porteuse de messages importants aux États-Unis. Cette décision de Seyyed Hassan Nasrallah alimente de nombreux débats au sein de la classe politique au Liban mais aussi dans les rangs de l'opposition au Hezbollah qui a favorablement accueilli l’initiative.

Saluant le secrétaire général du Hezbollah libanais qui a annoncé qu'un navire iranien transportant du carburant  et du fioul se dirigeait vers Beyrouth, César Maalouf, député du parti Forces libanaises, a déclaré : « Si le navire iranien transportant du carburant peut résoudre le problème de tous les Libanais soumis à des sanctions sévères et pas seulement des chiites, alors on ne devrait plus critiquer cette initiative. D'un autre côté, l'Iran n'est pas notre ennemi et la raison en est la présence de l'ambassadeur d'Iran au Liban. Notre seul ennemi, c’est Israël. »

Seyyed Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah, a annoncé il y a quelques jours  le départ d'un pétrolier iranien à destination du Liban pour sauver le peuple libanais d’une grave pénurie de carburant. 

Dans son discours choc à l'occasion de l'Achoura, le 19 août, il a déclaré : « Au milieu d'une grave pénurie de matières premières au Liban, un navire iranien transportant du carburant se dirige vers Beyrouth. Ce navire est en règle et grâce à la bénédiction de l'imam Hussein (PSL),  il va prendre la mer dans quelques heures. Nous considérons que les pétroliers iraniens font partie du territoire libanais puisque leur cargaison a été achetée par les hommes d'affaires libanais.  D’autres navires iraniens seront en route. Nous ne tolérerons pas l'humiliation de notre peuple ».

Alors que de nombreuses figures et groupes politiques en Liban, nationalistes et indépendantistes, ont salué la mesure Nasrallah, la qualifiant de « constructive » dans le sens du règlement de la crise libanaise. Des personnalités politiques telles que l'ancien Premier ministre libanais, Saad Hariri, ont par contre exprimé leur mécontentement.

Saad Hariri a prétendu que les importations de fioul d'Iran ouvriraient la voie à une « guerre civile » au Liban.

Visant vainement à propager l’esprit d'iranophobie, Hariri a essayé également de colporter l'illusion d'une guerre étrangère suite à l'importation de carburant d'Iran mais il semble que ses revendications n'aient pas été acceptées et prises en compte au Liban comme en témoigne la déclaration de César Maalouf.

Il a estimé que le fait de considérer les pétroliers iraniens comme faisant partie du territoire libanais était au contraire une violation de la souveraineté nationale du pays.

Ceci dit, la souveraineté du Liban a été violée  il y a trois ans, à un moment où le blocus de facto imposé par l’axe américano-israélien a empêché  le commerce libre entre le Liban et les pays voisins. D’ailleurs, les attaques du régime sioniste contre le territoire libanais, auxquelles seule la Résistance libanaise a répondu, sont littéralement une violation de la souveraineté libanaise.

Le 11 août, la Banque centrale du Liban a décidé d'émettre des crédits d'importation de carburant au taux de change du marché, le prix du dollar ayant dépassé 20 000 livres. Cette décision signifie une levée complète des subventions sur les carburants, rejetée par le gouvernement intérimaire, ce qui a déclenché des protestations populaires généralisées.

En fait, ce que le Hezbollah a voulu dire, est que toute attaque contre des navires iraniens est une attaque contre les intérêts du peuple libanais, et ne restera pas sans réponse. A l’instar de la réponse du Hezbollah aux attaques d'artillerie israéliennes contre le territoire libanais il y a quelques jours.

Réaction de l'ambassade américaine au Liban

L’une des réactions les plus intéressantes au projet du Hezbollah provient de l'ambassade américaine au Liban. Une heure après l’annonce du secrétaire général du Hezbollah qui a plongé l'ambassade US dans la confusion et la panique, Dorothy Shea, l'ambassadrice américaine à Beyrouth, a déclaré lors d’un appel téléphonique avec le président libanais, Michel Aoun, que son pays avait prévu un plan immédiat pour l’envoi de l'électricité et du gaz au Liban.              

Dans le cadre du plan, les États-Unis prétendent que la Jordanie importe du gaz d'Égypte et le connectera au réseau électrique entre la Jordanie, la Syrie et le Liban en produisant plus d'électricité, et des facilités seront également fournies pour le transfert de gaz égyptien via la Jordanie et la Syrie vers le nord du Liban.

Dorothy Shea a affirmé que le projet serait réalisé avec l'aide de la Banque internationale pour payer le prix du gaz égyptien, réparer les lignes de transport d'électricité et assurer la maintenance des gazoducs.

Les Libanais, même les opposants au Hezbollah, pensent que les mesures de l'ambassade américaine montrent que le projet d'importation du carburant d'Iran a forcé les États-Unis – en tant qu’auteur principal de la crise du carburant, de la pénurie de l’eau de l'électricité au Liban – à faire marche arrière et à s’engager à lever les sanctions.

Il est tout à fait clair que le Hezbollah a pris une mesure sans précédent en déclarant que le pétrolier iranien faisait partie du territoire libanais. Par conséquent, il y a des questions dont les réponses rendront plus clair le processus de changement du rapport de force dans la région.

1- Si Israël ou les États-Unis entravent la circulation du navire iranien ou confisquent sa cargaison, alors où et quand le Hezbollah répondra-t-il ? Le Hezbollah s'engagera-t-il dans une nouvelle guerre, une « guerre des pétroliers dans les eaux de la Méditerranée ou de la mer Rouge » ?

2- Si le navire atteint sa destination en toute sécurité, sa cargaison sera-t-elle déchargée dans un port libanais ou dans un port syrien ? Quel port acceptera les conséquences politiques intérieures et extérieures d'une telle action ? Le gouvernement intérimaire de Hassane Diab prendra-t-il la responsabilité des travaux ou le nouveau Premier ministre libanais Najib Mikati ? 

3- Compte tenu du scandale du renseignement et militaire américains en Afghanistan, les États-Unis oseront-ils prendre des mesures contre les navires iraniens transportant du carburant pour le peuple libanais ?

4- Le projet du Hezbollah d'importer du fioul d'Iran contribue-t-il au projet de formation d'un gouvernement libanais dirigé par Najib Mikati, ou à l'inverse, pourrait-il constituer un nouvel obstacle ?

 

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