Afghanistan: la CIA paie cher
(last modified Sat, 18 Dec 2021 18:06:09 GMT )
Dec 18, 2021 18:06 UTC
  • Afghanistan: la CIA paie cher

Le 23 août 2021, les forces américaines ont détruit la dernière base de la CIA en Afghanistan connue sous le nom d’« Eagle Base ». Utilisée par les États-Unis pendant les 20 ans de guerre en Afghanistan, Eagle Base s’est développée au fil du temps pour devenir un centre gigantesque de formation des forces antiterroristes afghanes.

Situé entre la périphérie industrielle de Kaboul et une chaîne de montagnes, le complexe se trouvait à moins de cinq kilomètres de l'aéroport international Hamid Karzai. Il s'étendait sur environ trois kilomètres et pouvait être vu sur des images satellite, mais il n'y a pratiquement aucune photographie au sol montrant l'intérieur du site, a écrit Mashregh News dans un article publié le 18 décembre.

Les habitants en savaient peu sur le complexe vigoureusement surveillé et conçu de sorte à ne pas être infiltré avec des murs atteignant trois mètres de haut qui entouraient le site et une épaisse porte en métal qui s'ouvrait et se fermait rapidement pour permettre aux voitures d'entrer. À leur arrivée, les véhicules devaient passer par trois points de contrôle où les passagers étaient interrogés et leurs documents vérifiés.

Détruire la base n'a pas été facile, selon un ancien sous-traitant de la CIA. En plus de brûler les documents et de détruire des disques durs, des équipements sensibles ont dû être retirés pour éviter qu'ils ne tombent entre les mains des talibans.

Les Américains n'avaient pas prévu l'ampleur d'une telle avancée des talibans et le départ soudain de la CIA; c'est pourquoi détruire la base sur-le-champ était leur unique voie d'autant plus que les talibans ont refusé la demande répétée d'un délai d'une semaine pour se retirer de l'Afghanistan. Le désarroi était tel que les forces spéciales britanniques ont dû se rendre à Kaboul en tenue traditionnelle d'Afghanes, burqa, pour pouvoir s’enfuir du pays.

Mais avant d’être obligée de détruire sa gigantesque base, la CIA avait subi plusieurs coups en Afghanistan dont le crash de son avion, dans le district de Deh Yak dans la province de Ghazni le 21 janvier 2020. L'avion avait très probablement à son bord Michael D’Andrea qui était responsable des affaires de l’Iran à la CIA et impliqué dans l’assassinat des deux hauts commandants de la Résistance près de l’aéroport de Bagdad le 3 janvier 2020.

De plus, sept agents de la CIA ont été tués lors d’un attentat suicide mené le 30 décembre 2009 par Humam al-Balawi contre la base Camp Chapman de la CIA située à Khost dans l’est de l’Afghanistan. Intimidé par le sort des Palestiniens dans les camps en Jordanie, al-Balawi, ressortissant jordanien, planifiait depuis des années de porter un coup dur aux États-Unis. Lui qui avait fait la promesse de remettre le chef adjoint d’al-Qaïda, a affirmé avoir des nouvelles de ce dernier et s’est précipité à bord d’une voiture piégée au cœur de la base Camp Chapman.

Dans ce contexte, il convient de rappeler le coup dur qu’a subi la CIA en 1993 à l’intérieur des territoires américains lors qu’un pachtoune pakistanais nommé Aimal Khan Kansi a mis fin au mythe d'impénétrabilité de la Central Intelligence Agency. Stationné près du siège de la CIA à Langley en Virginie dans le cadre d’une opération très complexe, Kansi a réussi à cibler cinq agents de la CIA dont deux ont été tués et trois blessés. Identifié et arrêté quelques années plus tard, il a été exécuté aux États-Unis en 2002 par injection létale. Sa dépouille a été accueillie en pompe par des milliers de personnes au Pakistan où il est considéré comme héros.

Le retrait humiliant d'Afghanistan et les coups infligés au fil des ans ont mis fin à l’invincibilité des États-Unis et brisé l'image hollywoodienne de la CIA pour accroître la peur des régimes saoudien et sioniste face à un allié non fiable. Aux aveux d’Amos Yadlin, ancien général de l'armée de l'air israélienne, la défaite américaine en Afghanistan a été un échec majeur du renseignement ; les sionistes craignent qu’il ne se répète proche des territoires occupés.

L’humiliation est telle que deux membres clés de la Commission des relations étrangères du Sénat, Bob Menendez, un démocrate du New Jersey, et James Risch, un républicain de l'Idaho, ont vivement attaqué l'administration Biden, qualifiant le retrait d'Afghanistan de "défaite honteuse". Le secrétaire d’État, Antony Blinken s’est présenté au Sénat pour répondre, or la colère des députés reste vive.

La fermeture de l'ambassade américaine à Kaboul et la destruction de la base de la CIA affectent directement les agissements des États-Unis en matière de sécurité et de renseignement dans une région sensible au voisinage de l’Iran. 

 

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