Nov 08, 2022 19:10 UTC
  • Pétrole:  Macron vire sur le Venezuela

Dans un changement de cap flagrant par rapport à ses positions antérieures envers le gouvernement vénézuélien, le président français Emmanuel Macron a appelé au dialogue et au renforcement des relations bilatérales avec le gouvernement du président vénézuélien Nicolas Maduro.

Après la victoire de Nicolas Maduro à l’élection présidentielle de 2019, le gouvernement français a été l’un des gouvernements occidentaux qui, après les États-Unis, ont reconnu Juan Guaido, chef de l’opposition vénézuélienne, comme président intérimaire et ont contesté la victoire de Maduro.

Des années après les tentatives infructueuses de l’Occident de renverser le gouvernement légal de Caracas, la guerre en Ukraine et la crise énergétique en Europe ont poussé le président français à réclamer le dialogue et l’amélioration des relations bilatérales avec le Venezuela en marge de la conférence des Nations unies sur le changement climatique en 2022, dite COP27, à Charm el-Cheikh.

Dans ce droit fil, les présidents français Emmanuel Macron et vénézuélien Nicolas Maduro se sont brièvement parlés, le 7 novembre, dans les couloirs de la COP27 à Charm el-Cheikh. Les deux hommes ont eu un échange courtois. Pendant l’échange d’une minute trente secondes environ, le président français a déclaré à Nicolas Maduro : « Je serais heureux qu’on puisse se parler plus longuement, que l’on puisse engager un travail bilatéral utile pour la région ».

Le ministère français des Affaires étrangères avait annoncé, le 26 janvier 2019, que « la France, ainsi que l’Espagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et le Portugal demandaient à Nicolas Maduro d’organiser des élections présidentielles anticipées et démocratiques ».

Face au refus et à l’indifférence de Maduro, la France et les 19 États membres de l’Union européenne ont reconnu, le 4 février 2019, Juan Guaido, président de l’Assemblée nationale et chef de l’opposition au Venezuela, comme président par intérim.

Lors de sa rencontre avec Maduro, le président Macron a déclaré que le continent américain se réunifiait et a demandé aux Vénézuéliens d’élargir leur dialogue pour commencer une coopération bilatérale. Le président français a également promis d’appeler Maduro une fois la COP27 terminée.

Le politologue Ammar Kazmi a déclaré : « C’est drôle de voir Macron si humble. Il y a quelques années à peine, il disait que le Venezuela n’était plus une démocratie et demandait plus de sanctions contre ce pays. Maintenant, il mendie du pétrole vénézuélien et essaie d’être ami avec Maduro. »

Le soutien apporté par Macron à « l’unification du continent américain » peut probablement être considérée comme une tentative du gouvernement français de renforcer les relations avec l’Amérique latine, compte tenu de la montée de la gauche dans cette région.

Le point qui mérite réflexion est que la guerre en Ukraine, la crise du pétrole et de l’énergie en Europe sont si graves qu’Emmanuel Macron, qui mettait en cause la démocratie au Venezuela et exigeait davantage de sanctions contre Caracas, réclame désormais le rapprochement avec ce pays afin de bénéficier de son pétrole.

La France, qui avait autrefois remis en question le gouvernement légal du Venezuela, a changé de cap maintenant et opté pour le rapprochement avec ce pays qui fait l’objet de sanctions occidentales. Mais pourquoi ? Parce qu’il est question des intérêts de l’Occident, intérêts qui font que les sanctions contre un pays avec des ressources stratégiques perdent leur utilité aux yeux des Occidentaux à un moment particulier. 

De cette façon, l’insistance sur l’imposition des sanctions d’une part et la levée de ces mêmes sanctions confirment, en effet, la politique de double standard de l’Occident.

« Dans un monde plein d’incertitudes, le caractère stratégique des ressources naturelles confère une large marge de manœuvre, dont les pays en développement doivent tirer parti, car elle produit des effets qui étaient impensables autrefois », a déclaré Nya Mbessa Merlin, doctorante en histoire des relations internationales.

« Excellente poignée de main avec le président de la France, Emmanuel Macron, dans le cadre de la COP27, qui est incontestablement un point de rencontre entre les gouvernements et les pays du monde. Les portes du Venezuela sont ouvertes au peuple français », a déclaré Maduro.

En juin, lors du sommet du G7 en Allemagne, la présidence française, s’inquiétant de la crise énergétique, avait évoqué « des ressources ailleurs qu’il faut aller explorer », lorgnant sur les productions de l’Iran et du Venezuela, et estimant que « le pétrole vénézuélien doit pouvoir être remis sur le marché ».

Nicolas Maduro avait aussitôt invité les entreprises françaises, lançant à la télévision : « Président Macron ! Le Venezuela est prêt à accueillir toutes les entreprises françaises qui voudraient venir produire du pétrole et du gaz ».

 

Mots clés