TANAP, la Route de la soie de l’énergie
Pour l’Iran, le pipeline TANAP est une voie d’accès idéale à l’Europe. Tant qu’il n’y aura pas de ligne alternative comme l’Islamic Gas Pipeline (IGP), dont l’accord de principe entre l’Iran, l’Irak et la Syrie date de juillet 2011, la Turquie restera le meilleur partenaire de l’Iran sur le marché énergétique et la plus proche porte d’accès au continent européen.
Un nouveau pipeline de gaz naturel traversera l’Azerbaïdjan et la Turquie pour arriver en Europe. C’est un pipeline de gaz naturel d’environ 2 000 kilomètres, développé par le « Trans-Anatolian Natural Gas Pipeline (TANAP) Project » et déjà en cours de construction. Relié au gazoduc Trans Adriatic Pipeline (TAP), il transférera le gaz de la mer Caspienne vers l’Europe.
Il est le cœur du corridor gazier sud-européen (alimentant l’Europe par le sud) et revêt une grande importance pour la sécurité énergétique de l’Union européenne.
Le champ gazier de Shah Deniz en Azerbaïdjan est le point de départ du transfert du gaz de la mer Caspienne vers l’Europe. Dans les étapes suivantes, le gaz de la Caspienne devrait entrer sur le marché européen.
TANAP et le gaz iranien
À l’heure où les entreprises étrangères quittent le marché énergétique et industriel de l’Iran, le lancement d’un projet comme TANAP dans le voisinage de l’Iran n’est pas une nouvelle réjouissante.
Surtout que la Turquie, avec son besoin croissant en énergie, est un marché stable pour le gaz iranien. TANAP fournira à la Turquie environ 20 % de sa demande.
Il lui permettra d’augmenter son pouvoir de négociation pour la consommation intérieure, mais sera aussi une voie de transit pour le gaz iranien vers l’Europe : l’Iran et la région d’Asie centrale étant des partenaires potentiels de ce projet.
Bien que la première phase du projet ait débuté au nom de l’Azerbaïdjan et de la Turquie, cela ne constitue qu’une partie d’un méga-projet. Sans les réserves de l’Iran et de l’Asie centrale, il serait dépourvu d’intérêt et de portée économiques.
Concurrence avec Gazprom
Le TANAP est le point de départ d’un méga-projet énergétique pour bousculer l’ordre établi sur le marché gazier de l’Europe. Nul doute que son principal concurrent est Gazprom.
Le géant Gazprom détient le monopole du gaz en Russie. Il a déjà en vue des plans à long terme pour acheter le gaz de la Caspienne à un coût très bas pour l’introduire sur le marché européen.
Avant que TANAP ne soit mis en place, les pays d’Asie centrale vendaient leur gaz que par le biais des pipelines de Gazprom. Or, si le volume des exportations gazières via TANAP prend des proportions considérables, le géant russe risquera sérieusement d’être évincé du marché européen.
Le volume actuel des exportations via le nouveau gazoduc représente environ 2 % de la demande européenne et 5 % des exportations de Gazprom vers l’UE.
Importance géopolitique de TANAP
Le premier but du projet « Une ceinture, une route : la Route de la soie moderne », présenté par la Chine en 2013, consiste à relier les économies importantes de l’axe euro-asiatique, grâce aux voies de communication, au commerce et aux investissements. Le projet n’est pas constitué d’une seule voie. Elle comprend plusieurs alternatives. Il y a deux itinéraires commerciaux importants, l’un terrestre et l’autre maritime. Le premier est la ceinture économique de la Route de la soie, et le second, la Route de la soie maritime. La Turquie est située dans le « corridor central », c’est-à-dire sur le corridor entre la Chine centrale et l’Asie occidentale. Sur le plan maritime, elle comprend un vaste réseau comprenant côtes et ports allant du Sud et du Sud-Est asiatique à l’Afrique de l’Est et au nord de la Méditerranée.
Des pays tels que la Chine, l’Iran et la Russie sont situés sur la ceinture économique de la Route de la soie. Et la Turquie sera le point de jonction avec l’Europe de la ceinture économique de la Route de la soie, englobant l’aspect routier et ferroviaire du projet.
Les développements géopolitiques ont fait de l’Iran un partenaire indispensable du projet euro-asiatique. La situation stratégique du pays apporte de nombreux avantages. Son implication dans des projets énergétiques d’une telle ampleur est diamétralement indispensable à son épanouissement et à son progrès tous azimuts ; sinon, c’est la concurrence, autrement dit les pays extra-régionaux, qui en profiteront.
TANAP représente une grande opportunité pour l’Iran qui, contrairement à la Russie, ne dispose pas de diverses voies pour exporter son gaz vers l’Europe. Et tant qu’il n’y aura pas de ligne alternative comme l’Islamic Gas Pipeline (IGP), la Turquie restera le meilleur partenaire de l’Iran sur le marché de l’énergie et la plus proche porte d’accès au continent européen.
TANAP est donc une aubaine pour l’Iran, mais représente un danger pour les autres pays du golfe Persique qui exportent du gaz en Europe.