Iran: MBS veut la guerre
Dans son nouvel article, Abdel Bari Atwan, rédacteur en chef du journal Raï al-Youm et éminent analyste du monde arabe, examine les récents développements de la guerre au Yémen.
Selon ce dernier, les deux conférences de presse, tenues samedi soir par les porte-parole militaires des deux parties au Yémen à savoir la coalition saoudienne et le mouvement Ansarallah, témoignent d'une nouvelle escalade des tensions, et dressent une nouvelle carte et équitation de la guerre dans le pays.
Le général de brigade, Turki Al-Maliki, porte-parole de la coalition d’agression saoudienne a fait part des informations militaires « choquantes », entre autres le lancement par les forces d’Ansarallah de plus de 430 missiles balistiques, l’utilisation de 851 voitures piégées, 100 vedettes et 247 mines navales.
Début 2015, il a montré une vidéo qui, selon lui, documentait ce qu'il a qualifié de « forces du Hezbollah » entraînant des membres du mouvement Ansarallah au lancement de drones. Il a également prétendu que l'aéroport civil de Sanaa s'était transformé en un aéroport militaire, base pour le lancement des missiles sur le royaume saoudien.
De son côté, le général de brigade Yahya Saree, porte-parole militaire du mouvement Ansarallah, a révélé que ses forces avaient lancé une attaque de grande envergure contre le gouvernorat d'al-Jawf, à la frontière sud-saoudienne, et avaient ainsi pris le contrôle de la région et la zone voisine de Yatama, d'une superficie de plus de 1,2 mille km², et menacé de s’infiltrer à l'intérieur de la frontière saoudienne, dans la prochaine étape d'opérations militaires.
Compte tenu des points abordés lors des deux conférences de presse, on peut, selon l’expert politique Atwan, envisager cinq pistes d’analyse :
– La colère et la frustration du porte-parole saoudien alors qu'il énumérait les missiles balistiques et les drones qui visaient des cibles sensibles dans les profondeurs saoudiennes, les grandes villes et les installations de l'industrie pétrolière.
– La tentative d'impliquer le Hezbollah et l'Iran dans la guerre du Yémen avec autant de clarté, et pour la première fois, l'ouverture de la voie à un rôle saoudien dans toute future guerre qui menacerait Israël et l’Amérique. Cela vise en effet à préparer l'opinion publique saoudienne à l'entrée de l'Arabie saoudite dans une telle guerre, et ainsi ouvrir son espace aérien à tout avion israélien et inciter les alliés de l'Arabie saoudite au Liban à déclencher la guerre civile pour y impliquer le Hezbollah. A l’heure actuelle, l'ambassadeur saoudien n'est plus à Beyrouth, et les relations libano-saoudiennes sont toujours tendues.
– Les menaces d'Al-Maliki de lever l'immunité des zones civiles et ses prétentions selon lesquelles ces zones étaient utilisées comme plates-formes de lancement de missiles et de drones et où des armements d'Ansarallah pouvaient être stockés annoncent que les frappes aériennes saoudiennes contre le Yémen reprennent leurs plans initiaux. Ainsi, des milliers de civils seront massacrés à la suite du bombardement des positions civiles yéménites par la coalition d'agression saoudienne. Depuis le début de la guerre, 570 000 civils yéménites ont été tués et trois fois plus blessés.
– Les allégations du porte-parole de la coalition d'agression saoudienne indiquent la tentative désespérée de l'Arabie saoudite de s'acquitter des crimes de bombardement de l'aéroport civil de Sanaa ; sous prétexte que cet aéroport est devenu une base militaire pour les attaques de missiles d’Ansarallah contre l'Arabie saoudite.
Ces allégations interviennent alors que l'aéroport de Sanaa abrite des organisations internationales et leurs représentants, et que l'utilisation de l'aéroport se limite justement aux avions de l'aéroport. Aussi, les organisations présentes à l'aéroport et leurs représentants n'ont jamais évoqué le lancement de missiles ou de drones depuis cet aéroport. De plus, le mouvement Ansarallah n'a pas besoin d'aéroport pour lancer ses missiles et ses drones, et peut facilement mener ces opérations depuis les zones montagneuses frontalières de l'Arabie saoudite.
– Les remarques de Yahya Saree concernant la reprise par les forces d’Ansarallah du contrôle sur la province d'al-Jawf et des zones adjacentes près de la frontière saoudienne et la volonté de commencer une nouvelle phase, dont la plus importante est le début des opérations avancées dans les villes saoudiennes, signifie que la prochaine phase des combats sera menée à la frontière de Jizan, de Najran et d’Asir, près des installations économiques et pétrolières de l'Arabie saoudite, ce qui pourrait entraîner une vague de migration saoudienne vers des zones plus sûres du nord.
D'autre part, le porte-parole de la coalition d’agression saoudienne a de nouveau proféré de fausses accusations contre l'Iran et le Hezbollah, leur attribuant un rôle direct dans la guerre au Yémen.
Ainsi, l'ambassadeur permanent de l'Arabie saoudite auprès des Nations Unies, Abdullah al-Moallem, avait plus tôt, lancé une campagne de répression contre la Syrie et le président Bachar al-Assad.
Atwan ajoute par la suite que tous ces événements indiquent la position de l’Arabie saoudite dans le sens de l'hostilité envers l'axe de la Résistance, avant la cinquième série des pourparlers qui se tiendront dans les prochains jours entre Téhéran et Riyad à Bagdad.
Atwan conclut que le lancement par le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane de la guerre au Yémen en 2015, avait eu un effet inverse, engageant l'Arabie saoudite dans une guerre d'usure au niveau matériel et politique sans aucun gain. Les résultats de cette aventure seront-ils différents dans la prochaine étape ? Les développements de la guerre au Yémen au cours de la nouvelle année détermineront tout. Au cours de la nouvelle année, il semble qu'il y aura de nombreuses surprises d'Ansarallah pour la coalition saoudienne.